Une fois, au travail, j’ai eu un rendez-vous avec un monsieur aveugle. Il avait besoin d’aide pour remplir des papiers (ce qui est compliqué quand on ne voit pas).

Je lui ai donc rempli ses papiers, je lui ai tout relu pour m’assurer qu’il sache ce qu’il signait, et est venu le moment de signer. J’ai regardé le papier, la minuscule case pour la signature, il m’a demandé où elle était, je me suis sentie bête, j’ai eu honte de notre système si exclusif, je me suis demandé comment me sortir de cette impasse… et je lui ai simplement demandé comment je pouvais lui indiquer la case.

Un point commun à toutes les personnes ayant des besoins spécifiques : la personne saura mieux que moi (et vous) ce dont elle a besoin. Et en règle générale, les gens aiment qu’on leur demande de quoi ils ont besoin. Moi, en tout cas, j’aime qu’on me pose la question (même si ça n’arrive pas souvent).

Bref, j’ai fait ce qu’il m’a dit de faire, il a signé, je l’ai raccompagné dans le dédale des couloirs. Et ce soir-là, je me suis couchée moins bête mais des questions plein la tête.

La société exclut les gens atteints d’un handicap. Est-ce à eux de faire un effort, alors qu’ils ont déjà à subir la souffrance quotidienne, les limites de leur corps, de leur esprit ou de la médecine ? Ou est-ce nous, en tant que privilégiés de n’avoir aucun fardeau à porter, qui avons la responsabilité tout faire pour qu’ils aient le sentiment d’être réellement à leur place ?

Parce que – attention humour noir à l’opposé de mes idées – si on ne veut pas d’eux, d’autres ont trouvé des solutions radicales.