Les élèves se placent en rang d’oignons sur la ligne de départ. Miss Society, la prof de sport, les regarde avec perplexité :

« Bah, qu’est-ce que vous faites ? » Personne n’ose parler. « Jules, ton père est ingénieur et ta mère fonctionnaire, pas vrai ? Avance de 15 mètres. Justine, ta mère est DRH et ton père rentier, va chercher un vélo et mets-toi à côté de Jules. Corentin, tu es élevé juste par ta mère, je crois ? Tu feras deux tours au lieu d’un, et en marche arrière. Quant à toi, Lisa… il y a des problèmes de violence à la maison, hein ? Jules, va chercher les cordes d’escalade, tu la saucissonnes bien serré.

— Mais, M’dame, c’est pas juste !

— Faites ce que je vous dis, bande de clampins ! »

Les élèves finissent par obéir aux ordres et de lancent tous en même temps. Justine, sur son vélo, arrive la première, Jules la suit de peu. Corentin finit par atteindre la ligne d’arrivée, essoufflé et désorienté. Après s’être courageusement battue pour faire quelques mètres en sautillant, Lisa abandonne : même en se traînant par terre, il lui faudrait des heures pour rejoindre ses camarades.

« Allez, un petit effort, bande de mollassons ! Lisa, qu’est-ce que tu fiches encore à traîner loin derrière ? Et toi, Corentin, on peut savoir ce qui t’a pris autant de temps ? Suivez plutôt l’exemple de Justine, elle s’est donnée à fond ! »

La vie. La même ligne d’arrivée pour tout le monde, mais pas la même course.