Un des débats les plus fournis de l’histoire des contes de fées, est la question de la pantoufle. Cendrillon avait-elle une pantoufle de verre (autrement dit, cette matière solide et transparente) ou de vair (fourrure argentée d’un écureuil) ? Et la réponse est… (roulement de tambours)
… de verre !
C’est d’ailleurs son titre : Cendrillon ou la Petite Pantoufle de verre. On fait difficilement plus limpide, sans mauvais jeu de mots, pour trancher le débat. Alors certes, on me répondra que c’est plus vraisemblable que ce soit du vair, parce que des chaussures en verre, ça doit être moyennement confortable quand il s’agit de danser toute la nuit.
Mais dans la version de Charles Perrault, les pantoufles sont en verre. Que ce soit confortable et vraisemblable ou pas, on parle quand même de Perrault, un homme de lettres du XVIIe siècle, qui savait sans doute lire et écrire le latin et le grec (entre autres) et ne ferait sûrement pas ce genre de faute. Si moi, simple écrivaillonne restée imperméable à 4 ans de latin, je connais la différence entre un vers, un ver, du vair et du verre, il est certain que lui aussi.
Restent les questions du confort et de la vraisemblance. Pour le confort, je vous conseille d’essayer de porter une de ces robes bouffantes avec une armature en os de baleine, sans parler du corset. Vous verrez qu’il y a pire que d’avoir des ampoules aux pieds à cause de chaussures un peu trop rigides. Quant à la vraisemblance, on parle quand même d’une histoire où une fée transforme une citrouille en carrosse. C’est tout ce que j’ai à dire.
Mais ce que ce débat vieux de bientôt deux siècles démontre, c’est que même dans un univers où les fées transforment des citrouilles en carrosse, on préférera estimer qu’un homme lettré a fait une faute d’orthographe, plutôt que d’admettre que la littérature a ses raisons que la raison ignore.